Capitale du Maroc, Rabat est une ville où l’histoire millénaire côtoie une modernité apaisée. Loin de l’effervescence de ses voisines Marrakech ou Fès, elle offre une expérience de voyage singulière, mêlant monuments impériaux, jardins luxuriants et une scène culturelle en plein essor. Perchée sur la côte atlantique, à l’embouchure du fleuve Bouregreg, la ville séduit par son atmosphère sereine, ses larges avenues aérées et ses sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO. De la forteresse immaculée des Oudayas à la poésie des ruines de Chellah, en passant par le gigantisme inachevé de la Tour Hassan, chaque recoin de Rabat raconte une facette de l’histoire du royaume. C’est une invitation à la découverte d’un Maroc authentique, à la fois ancré dans ses traditions et résolument tourné vers l’avenir.
Explorer la Kasbah des Oudayas
Véritable village fortifié au sein de la ville, la Kasbah des Oudayas est l’un des joyaux de Rabat. Fondée au XIIe siècle par les Almohades, cette citadelle a servi de base militaire avant de devenir le refuge de pirates puis de familles andalouses. Aujourd’hui, elle offre une parenthèse enchantée, une immersion dans un dédale de ruelles où le blanc des murs crépis à la chaux contraste avec le bleu éclatant des portes et des soubassements.
Une citadelle aux accents andalous
Se perdre dans la Kasbah est la meilleure façon de la découvrir. Les rues étroites et sinueuses, pavées de manière irrégulière, débouchent sur de petites places ombragées ou des points de vue imprenables. L’influence andalouse est omniprésente, rappelant les villages blancs du sud de l’Espagne. Le silence qui y règne, à peine troublé par le cri des mouettes, en fait un lieu particulièrement reposant. Au fil de la promenade, on découvre des portes sculptées, des fontaines discrètes et des chats assoupis au soleil. La mosquée El Atiqa, la plus ancienne de Rabat, se dresse discrètement au cœur de ce labyrinthe.

Un panorama exceptionnel sur l’estuaire et l’océan
Le point d’orgue de la visite est sans conteste la plateforme du sémaphore. De là, le panorama est saisissant : il embrasse l’embouchure du fleuve Bouregreg, la ville voisine de Salé et l’immensité de l’océan Atlantique. C’est l’endroit idéal pour observer le ballet des barques de pêcheurs et sentir la brise marine. À proximité, le célèbre Café Maure offre une halte traditionnelle pour siroter un thé à la menthe accompagné de cornes de gazelle, tout en profitant de la vue spectaculaire. La visite se termine souvent par la porte monumentale Bab Oudaïa, un chef-d’œuvre de l’architecture almohade qui marque l’entrée de la forteresse.
Après l’atmosphère intime de cette forteresse historique, un changement d’échelle s’impose avec la visite de deux monuments grandioses qui définissent la silhouette de la ville et témoignent de son importance politique et spirituelle.
Visiter la Tour Hassan et le Mausolée Mohammed V

Situés sur une vaste esplanade qui domine le fleuve, la Tour Hassan et le Mausolée Mohammed V forment un ensemble monumental incontournable. Ce site emblématique combine un projet architectural démesuré du XIIe siècle avec un hommage moderne à la royauté marocaine, créant un dialogue fascinant entre le passé et le présent.
La Tour Hassan, un rêve de grandeur inachevé
La Tour Hassan est le minaret de ce qui aurait dû être la plus grande mosquée du monde musulman. Le projet fut lancé en 1195 par le sultan almohade Yacoub al-Mansour, mais les travaux furent abandonnés à sa mort quatre ans plus tard. Le minaret, qui devait culminer à plus de 60 mètres, s’arrêta à 44 mètres. L’esplanade est parsemée des vestiges de 200 colonnes qui devaient soutenir la salle de prière, créant un paysage à la fois puissant et mélancolique. La tour elle-même est remarquable par sa sobriété et ses rampes intérieures, conçues pour que le muezzin puisse y monter à cheval.
Dimensions et caractéristiques de la Tour Hassan
| Caractéristique | Mesure |
|---|---|
| Hauteur actuelle | 44,3 mètres |
| Largeur de la base | 16,2 mètres |
| Date de début de construction | 1195 |
| Matériaux principaux | Grès rouge |
Le Mausolée Mohammed V, un chef-d’œuvre de l’art marocain
Juste en face de la tour se dresse le Mausolée Mohammed V, un édifice d’une blancheur éclatante construit entre 1961 et 1971. Il abrite les tombes du roi Mohammed V, grand-père de l’actuel monarque, et de ses deux fils, le roi Hassan II et le prince Moulay Abdallah. L’extérieur, en marbre italien, est sobre, mais l’intérieur est une explosion d’artisanat marocain traditionnel. Les murs sont recouverts de zelliges (mosaïques), les plafonds en bois de cèdre sont sculptés et peints, et le sarcophage en onyx blanc repose sous une coupole dorée à la feuille. L’accès est gratuit et ouvert à tous, sous le regard impassible des gardes royaux en tenue d’apparat.
Après la majesté de ces édifices commémoratifs, un retour à la quiétude et à la nature s’offre à quelques pas de là, dans un havre de paix insoupçonné niché au cœur de la citadelle voisine.
Se promener dans les jardins andalous
Attenants à la Kasbah des Oudayas, les jardins andalous constituent une oasis de fraîcheur et de tranquillité. Créés au début du XXe siècle par un architecte paysagiste français, ils recréent l’atmosphère des jardins mauresques d’Andalousie, offrant un espace de détente structuré où la végétation luxuriante dialogue avec le murmure de l’eau.
Une composition florale et architecturale
Le jardin est conçu selon un plan géométrique rigoureux, avec des allées rectilignes bordées de buis taillé. L’ombre y est abondante grâce à une profusion d’arbres fruitiers : orangers, citronniers, et bananiers se mêlent aux dattiers et aux cyprès. La palette de couleurs est complétée par les fleurs éclatantes des bougainvilliers, des hibiscus et des lauriers-roses. C’est un lieu parfait pour une pause après avoir arpenté les remparts, un endroit où les senteurs d’agrumes et de jasmin embaument l’air. Les fontaines et les petits canaux d’irrigation ajoutent une touche de fraîcheur sonore à l’ensemble.
Un musée au cœur de la verdure
Au fond du jardin se trouve un palais construit au XVIIe siècle qui abrite aujourd’hui le Musée National de la Parure (anciennement Musée des Oudayas). Ce musée présente une collection fascinante de bijoux et de parures traditionnelles provenant de différentes régions du Maroc. La visite du musée permet non seulement d’admirer le savoir-faire des artisans marocains mais aussi de découvrir l’intérieur d’une demeure historique, avec ses patios, ses boiseries et ses zelliges. L’association du jardin et du musée crée une expérience culturelle et sensorielle complète.
Cette parenthèse de verdure et d’histoire invite à remonter encore plus loin dans le temps, sur un site où l’histoire antique et médiévale se superposent dans un décor rendu poétique par la nature.
Découvrir la nécropole de Chellah
Située à l’extérieur des remparts de la ville, la nécropole de Chellah est l’un des sites les plus romantiques et évocateurs de Rabat. Ce lieu magique superpose les vestiges d’une cité romaine antique, Sala Colonia, et une nécropole musulmane de la dynastie des Mérinides, le tout dans un écrin de verdure où les cigognes ont élu domicile.
Un voyage à travers les strates de l’histoire
Dès l’entrée, marquée par une imposante porte mérinide, le visiteur plonge dans un univers hors du temps. Le sentier descend à travers les ruines romaines, où l’on peut encore distinguer les contours du forum, du capitole et d’un arc de triomphe. Plus loin, on découvre la partie islamique du site, construite au XIVe siècle. Elle comprend les ruines d’une mosquée, d’une médersa (école coranique) et de plusieurs tombeaux, dont celui du sultan Abou al-Hassan. La coexistence de ces deux civilisations sur un même lieu confère à Chellah une atmosphère unique et mystérieuse. On y trouve notamment :
- Les vestiges du Decumanus Maximus, l’ancienne voie principale romaine.
- Le bassin aux ablutions de la mosquée mérinide.
- Le tombeau de Chams ed-Doha, une des épouses favorites du sultan.
- Une source réputée pour sa fertilité, où les visiteurs jettent des pièces.
Un sanctuaire pour les cigognes
Ce qui rend Chellah si spécial, c’est aussi sa faune. Le site est devenu une terre d’accueil pour des dizaines de cigognes qui construisent leurs nids au sommet du minaret en ruine et des anciens remparts. Leur claquement de bec caractéristique rythme la visite et ajoute à la poésie du lieu. La végétation a repris ses droits, créant un jardin sauvage où figuiers, oliviers et fleurs sauvages poussent au milieu des pierres anciennes. C’est un lieu profondément paisible, idéal pour une promenade méditative loin de l’agitation de la ville.
Des vestiges du passé aux pulsations de la vie présente, l’exploration de Rabat se poursuit au cœur de son centre névralgique et commerçant, où l’histoire s’écrit au quotidien.
Flâner dans la médina de Rabat
Inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, la médina de Rabat offre une expérience plus authentique et moins frénétique que celles de Marrakech ou de Fès. Protégée par ses remparts andalous du XVIIe siècle, elle constitue le cœur historique de la ville. C’est un lieu de vie et de commerce où il fait bon se promener pour sentir le pouls de la capitale.
Une atmosphère décontractée et commerçante
La médina s’organise autour de quelques artères principales, comme la rue des Consuls, célèbre pour ses boutiques de tapis et d’artisanat, et la rue Souika, plus populaire et animée. Contrairement à d’autres médinas, celle de Rabat est relativement facile à naviguer et les sollicitations des vendeurs y sont moins pressantes. On peut y flâner en toute tranquillité, observer les artisans au travail et s’imprégner de l’ambiance locale. Le Souk Es Sebbat, un marché couvert, est un passage obligé pour découvrir les échoppes de maroquiniers, de babouchiers et de bijoutiers.
Trésors cachés et vie de quartier
Au-delà des axes principaux, s’aventurer dans les ruelles adjacentes permet de découvrir le vrai visage de la médina. On y trouve des places tranquilles, des fontaines anciennes, des fours à pain traditionnels (ferranes) et de petites mosquées de quartier. C’est dans ce labyrinthe que se cachent de nombreux riads transformés en maisons d’hôtes ou en restaurants discrets. La partie nord de la médina, près de la Kasbah des Oudayas, est particulièrement pittoresque avec ses maisons peintes en bleu et blanc. C’est une immersion dans le quotidien des Rbatis, loin des circuits touristiques balisés.
Au-delà de l’artisanat traditionnel qui anime les souks, Rabat s’affirme également comme une capitale de la création contemporaine, comme en témoigne son musée le plus emblématique, vitrine de la modernité artistique du royaume.
Visiter le Musée Mohammed VI d’Art Moderne et Contemporain

Inauguré en 2014, le Musée Mohammed VI d’Art Moderne et Contemporain (MMVI) est la première institution muséale du Maroc entièrement dédiée à ces périodes artistiques. Situé au cœur de la ville nouvelle, son architecture audacieuse, inspirée des moucharabiehs traditionnels, en fait un signal fort de l’engagement du pays en faveur de la culture.
Un écrin architectural pour l’art marocain
Le bâtiment lui-même est une œuvre d’art. Sa façade blanche, ajourée de motifs géométriques, joue avec la lumière et crée des ombres délicates. À l’intérieur, les espaces d’exposition sont vastes, lumineux et parfaitement adaptés à la mise en valeur des œuvres. Le parcours de visite est fluide et permet de découvrir l’évolution de l’art marocain depuis le début du XXe siècle jusqu’aux créations les plus récentes. Le musée est un symbole du renouveau culturel de Rabat et une étape essentielle pour comprendre la scène artistique du pays.
Des collections riches et diversifiées
Le MMVI abrite une collection permanente de plus de 400 œuvres, offrant un panorama complet de la création marocaine. On y retrouve les pionniers de la modernité comme Ahmed Cherkaoui ou Jilali Gharbaoui, ainsi que des figures majeures de l’art contemporain telles que Mounir Fatmi ou Lalla Essaydi. Le musée organise également des expositions temporaires de grande qualité, mettant en lumière des artistes internationaux de renom ou explorant des thématiques spécifiques. C’est un lieu vivant, qui propose régulièrement des conférences, des ateliers et des projections, faisant de lui un acteur central de la vie culturelle de la capitale.
Rabat se révèle être une destination aux multiples facettes. De la sérénité de la Kasbah des Oudayas à la majesté de la Tour Hassan, en passant par la poésie de Chellah et le dynamisme de la médina, la capitale marocaine offre un condensé d’histoire, d’art et de culture. L’exploration de ses jardins paisibles et la découverte de son musée d’art contemporain complètent ce portrait d’une ville qui a su préserver son patrimoine tout en s’inscrivant dans la modernité. Un séjour à Rabat est la promesse d’une expérience riche et apaisante, au cœur d’un Maroc authentique et accueillant.



