L’Islande, terre de glace et de feu, présente un écosystème singulier où la faune, bien que peu diversifiée sur le plan terrestre, révèle une richesse insoupçonnée le long de ses côtes et dans ses eaux profondes. L’isolement géographique de l’île a dicté une histoire naturelle unique, façonnée par les migrations, les introductions humaines et une adaptation remarquable aux conditions extrêmes. Cette exploration de la faune islandaise commence par le seul mammifère qui peut se targuer d’être un véritable natif de ces terres volcaniques.
Exploration de l’unique renard polaire d’Islande
Le renard polaire, ou vulpes lagopus, est le seul mammifère terrestre endémique de l’Islande, un véritable survivant de l’ère glaciaire. Arrivé sur l’île à la fin de la dernière période de glaciation en traversant la mer gelée, il s’est depuis parfaitement adapté à un environnement où la concurrence est quasi inexistante. Son existence est un témoignage de la résilience et de l’ingéniosité de la nature.
Morphologie et adaptation
Cet animal fascinant se présente sous deux morphes de couleur distincts, indépendamment de la saison. Le morphe blanc, immaculé en hiver pour un camouflage parfait dans la neige, devient brun-gris en été. Le morphe « bleu », plus courant sur les côtes islandaises, conserve une couleur gris-brun foncé toute l’année, offrant un excellent camouflage sur les roches volcaniques. Sa fourrure dense, ses petites oreilles et son museau court sont des adaptations clés pour minimiser la perte de chaleur dans un climat rigoureux.
Régime alimentaire et habitat
En tant qu’opportuniste, le renard polaire a un régime alimentaire très varié qui dépend des saisons et de son habitat. Il est un prédateur redoutable pour de nombreuses espèces d’oiseaux, s’attaquant aux œufs et aux oisillons durant la période de nidification. Son menu comprend également :
- Des lemmings et autres petits rongeurs
- Des baies et des algues
- Des insectes
- Des carcasses d’animaux échouées sur le littoral, comme des phoques ou des poissons
Il vit principalement dans les régions les plus reculées, notamment dans la réserve naturelle de Hornstrandir dans les fjords de l’Ouest, où il est protégé de la chasse et peut être observé dans son milieu naturel.
Si le renard polaire est le seul autochtone, d’autres mammifères terrestres ont depuis colonisé l’île, non pas par les voies de la nature, mais par l’intervention humaine.
Rencontre avec les mulots gris et visons introduits
L’écosystème terrestre islandais a été profondément modifié par l’arrivée de l’homme et, avec lui, de nouvelles espèces. Le mulot gris et le vison d’Amérique sont deux exemples frappants d’animaux introduits qui ont su s’établir durablement sur l’île, avec des conséquences notables pour la faune locale.
Le mulot gris, un colon discret
Le mulot gris, ou apodemus sylvaticus, est aujourd’hui le seul rongeur présent sur l’ensemble du territoire islandais. Probablement arrivé à bord des navires vikings, il a trouvé une niche écologique favorable, sans prédateur naturel majeur à l’exception du renard polaire et de certains oiseaux de proie. Sa présence, bien que discrète, a un impact sur la végétation et peut influencer la dynamique des populations d’invertébrés.
Le vison d’Amérique, un prédateur échappé
L’histoire du vison d’Amérique en Islande est plus récente et plus controversée. Introduit dans les années 1930 pour l’élevage et le commerce de sa fourrure, de nombreux individus se sont échappés des fermes. Ils ont rapidement colonisé les rivières et les côtes de l’île, devenant une espèce invasive. Prédateur efficace et agressif, le vison a un impact négatif significatif sur les populations d’oiseaux nichant au sol et sur les stocks de poissons d’eau douce. Malgré des campagnes de chasse, sa population reste solidement implantée à l’état sauvage.
Espèce introduite | Origine de l’introduction | Impact principal sur l’écosystème |
---|---|---|
Mulot gris | Accidentelle (navires) | Compétition alimentaire modérée, dispersion de graines |
Vison d’Amérique | Volontaire (élevage) puis accidentelle (évasions) | Prédation élevée sur l’avifaune et les poissons |
Une autre espèce, bien plus grande, fut également introduite par l’homme, mais son histoire a pris un tournant différent, la menant vers un retour à la vie sauvage dans les vastes étendues de l’Est.
Le retour du renne sauvage dans l’Est islandais
Contrairement aux petites créatures introduites, le renne a été importé de Norvège et de Laponie à la fin du XVIIIe siècle dans un but agricole. Les tentatives d’élevage se sont soldées par des échecs, et les animaux ont été relâchés ou se sont échappés, retournant à l’état sauvage. Aujourd’hui, ils forment une population stable et emblématique de l’Islande orientale.
Une population sous surveillance
La population de rennes, qui compte environ 3 000 individus, est aujourd’hui protégée mais gérée par une chasse régulée pour maintenir l’équilibre de l’écosystème et éviter le surpâturage. Ces animaux majestueux vivent en troupeaux et migrent entre les hauts plateaux en été et les vallées côtières plus abritées en hiver. Leur observation est un moment fort pour les visiteurs explorant les régions de l’Est, notamment autour de la ville d’Egilsstaðir.
Adaptation à un nouvel environnement
Le renne islandais s’est remarquablement bien adapté aux conditions locales. Il se nourrit principalement de lichens, de mousses et d’herbes, trouvant sa subsistance dans un paysage souvent aride. Son retour à l’état sauvage est un cas d’étude intéressant sur la capacité d’une espèce à se réensauvager dans un environnement propice, dépourvu de ses prédateurs naturels d’origine comme le loup ou l’ours.
L’histoire de l’introduction d’animaux en Islande ne se limite pas aux espèces retournées à l’état sauvage ; elle inclut également des animaux domestiques qui sont devenus des piliers de la culture et de l’économie locales.
La robustesse du cheval islandais
Arrivé avec les premiers colons vikings, le cheval islandais est plus qu’un simple animal domestique ; il est une icône nationale et un partenaire de vie depuis plus de mille ans. Sa pureté génétique est farouchement protégée : une loi interdit toute importation de chevaux sur l’île. Ainsi, un cheval qui quitte l’Islande ne peut jamais y revenir.
Un physique adapté aux extrêmes
Petit, trapu et incroyablement endurant, le cheval islandais est parfaitement bâti pour affronter les terrains accidentés et le climat rude de l’île. Sa longue crinière et sa fourrure épaisse le protègent du froid et du vent. Son caractère est réputé pour être docile, curieux et fiable, ce qui en fait une monture idéale pour l’équitation de loisir et les longues randonnées.
Les allures uniques : tölt et amble
Ce qui distingue véritablement le cheval islandais, ce sont ses allures. En plus des trois allures classiques que sont le pas, le trot et le galop, il en possède deux supplémentaires, naturelles et innées :
- Le tölt : une allure à quatre temps, incroyablement confortable pour le cavalier, qui permet de couvrir de longues distances rapidement et sans secousses.
- L’amble volant : une allure latérale à deux temps très rapide, utilisée pour les courses sur de courtes distances, où le cheval peut atteindre des vitesses de près de 50 km/h.
Le cheval partage le paysage islandais avec un autre animal domestique tout aussi emblématique et essentiel à la survie des premiers habitants.
Les moutons islandais et leur importance économique
Tout comme le cheval, le mouton islandais a été introduit par les Vikings et constitue une race pure, isolée depuis des siècles. On dit souvent qu’il y a plus de moutons que d’habitants en Islande, et leur présence est en effet une constante dans le paysage rural. Ils sont un pilier de l’économie et de la culture islandaises.
Une race à double aptitude
Le mouton islandais est réputé pour sa double aptitude. Sa laine est particulièrement remarquable : elle est composée de deux couches. La couche externe, appelée tog, est longue, résistante et imperméable, tandis que la couche interne, le þel, est fine, douce et isolante. Cette combinaison unique permet de produire la fameuse laine Lopi, utilisée pour tricoter les traditionnels pulls islandais, les lopapeysa. Parallèlement, sa viande, notamment l’agneau, est très appréciée pour sa saveur délicate, issue d’animaux élevés en liberté et se nourrissant de l’herbe et des herbes aromatiques des hauts plateaux.
Le « réttir », une tradition ancestrale
Chaque automne, une tradition communautaire appelée réttir a lieu. Les fermiers, à cheval et à pied, rassemblent les milliers de moutons qui ont passé l’été à paître librement dans les montagnes. Les animaux sont ensuite triés dans de grands enclos circulaires, chaque éleveur récupérant son troupeau. C’est un événement social et culturel majeur, témoignant du lien profond entre les Islandais et cet animal frugal.
Depuis les pâturages verdoyants, notre regard se tourne désormais vers les côtes déchiquetées de l’île, où une autre forme de vie mammifère prospère à la rencontre de la terre et de l’océan.
Observation des pinnipèdes sur les côtes islandaises
Les côtes islandaises sont un habitat privilégié pour plusieurs espèces de pinnipèdes, ces mammifères marins carnivores aux membres en forme de nageoires. Les phoques, en particulier, sont des résidents communs et leur observation est une activité prisée des visiteurs. Leur présence témoigne de la richesse des eaux environnantes.
Les espèces résidentes
Deux espèces de phoques se reproduisent et vivent toute l’année en Islande :
- Le phoque veau-marin (phoca vitulina) : C’est le plus commun. On peut l’observer se prélassant sur les rochers ou les plages de sable noir à marée basse.
- Le phoque gris (halichoerus grypus) : Plus grand et plus massif que le veau-marin, il est également très présent mais souvent dans des zones plus exposées.
Des lieux comme la péninsule de Vatnsnes, avec le rocher de Hvítserkur, ou la lagune glaciaire de Jökulsárlón, sont des sites d’observation exceptionnels. D’autres espèces, comme le phoque du Groenland ou le phoque à capuchon, sont des visiteurs plus occasionnels.
Un visiteur polaire occasionnel
Il convient de mentionner un visiteur rare mais marquant : l’ours polaire. Venu du Groenland sur des blocs de banquise dérivants, sa présence en Islande est exceptionnelle et malheureusement souvent tragique. Considéré comme une menace pour le bétail et les humains dans un pays non préparé à sa présence, il est généralement abattu par les autorités. Ces événements soulignent les changements climatiques qui affectent les routes de glace de l’Arctique.
Au-delà des côtes, les eaux islandaises abritent des créatures encore plus imposantes, véritables géants des mers qui attirent des curieux du monde entier.
Richesse cétologique des eaux islandaises
Les eaux froides et riches en nutriments qui entourent l’Islande constituent l’une des meilleures zones d’alimentation au monde pour les cétacés. Plus de vingt espèces de baleines, de dauphins et de marsouins fréquentent ces eaux, faisant de l’observation des baleines, ou whale watching, une industrie touristique majeure.
Les géants des mers
Parmi les espèces les plus fréquemment observées lors des excursions en mer, on trouve plusieurs types de rorquals. Le rorqual commun, le rorqual boréal et surtout la baleine de Minke sont des visiteurs réguliers des baies islandaises. La majestueuse baleine à bosse est également une star des sorties, célèbre pour ses sauts spectaculaires et ses chants complexes. Le plus grand animal de la planète, la baleine bleue, peut aussi être aperçu, bien que plus rarement.
Prédateurs et plongeurs des profondeurs
Les eaux islandaises sont également le terrain de chasse de super-prédateurs comme l’orque, ou épaulard, particulièrement visible autour de la péninsule de Snæfellsnes où il chasse le hareng. Le cachalot, immortalisé par le roman Moby Dick, est aussi présent, plongeant dans les profondeurs abyssales à la recherche de calmars géants. Enfin, plusieurs espèces de dauphins, comme le dauphin à bec blanc, animent les vagues de leur nage rapide et de leurs acrobaties.
Espèce de cétacé | Fréquence d’observation | Caractéristique notable |
---|---|---|
Baleine de Minke | Très fréquente | Petite taille pour un rorqual, très curieuse |
Baleine à bosse | Fréquente | Sauts spectaculaires, longues nageoires pectorales |
Dauphin à bec blanc | Fréquent | Nage en groupes, comportement joueur |
Orque | Saisonnière | Super-prédateur, techniques de chasse en groupe |
Baleine bleue | Rare | Le plus grand animal ayant jamais vécu sur Terre |
Cette abondance marine coexiste avec la pratique controversée de la chasse à la baleine, toujours autorisée en Islande bien que de plus en plus marginalisée face aux bénéfices économiques et écologiques du tourisme d’observation.
La faune islandaise est une fascinante mosaïque d’espèces natives, introduites, domestiquées et marines. Du renard polaire, seul survivant terrestre originel, aux majestueuses baleines qui peuplent ses eaux, chaque animal raconte une partie de l’histoire de cette île unique. La cohabitation entre l’homme et ces espèces, qu’elle soit harmonieuse avec le cheval et le mouton ou complexe avec le vison et les cétacés, continue de façonner les paysages et la culture de l’Islande.